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Le syndrome de l’imposteur: on en parle?

Samedi 7 aout 2021, l’équipe de France de handball vient de gagner sa 3ème finale olympique à Tokyo et Luc Abalo dit : « quel soulagement ! Car ce matin en mettant mes baskets je n’étais pas serein, j’avais l’impression bizarre de ne pas mériter ma place : je me suis senti comme un imposteur ». Pour rappel Luc Abalo est 3 fois champion Olympique et 3 fois champion du monde[1].

Alors comment, avec un tel palmarès, est-ce encore possible de se sentir comme un imposteur ? Et finalement quelles sont les sensations de ce fameux syndrome de l’imposteur qui touche entre 60 et 70% de la population mondiale au moins une fois dans sa vie ?

Il y a cette peur de ne pas être à la hauteur, il y a l’impression de tromper les gens qui nous font confiance, il y a cette crainte que très bientôt quelqu’un va démasquer l’imposteur, et il y a cette conviction profonde que la réussite est une combinaison de facteurs externes comme la chance, le hasard, la facilité de la tâche. Ainsi dans le syndrome de l’imposteur on externalise les réussites (qui sont le fruit d’un environnement favorable, par exemple) et on internalise les échecs (« c’est de ma faute : pas assez de compétences et d’intelligence »).


[1] WWW.ffhandball.fr

Quelles sont les caractéristiques du syndrome ?

D’abord l’intelligence et la performance sont considérées comme des notions figées sans possibilité d’évoluer (ex : il n’y a pas d’apprentissage de ses échecs), l’anxiété et la peur de l’échec sont omniprésentes ; sans oublier la culpabilité vis-à-vis de la réussite car « les imposteurs » estiment ne pas la mériter. Pire ! Ils sont convaincus d’être incapables de reproduire une réussite ce qui traduit un déficit de confiance, exacerbé par la peur croissante de l’exigence de l’entourage (exigence souvent fantasmée, d’ailleurs !).

Le cerveau fait donc face à un stress chronique par la peur d’être démasquée. Cette peur peut expliquer qu’il devient impossible d’accepter la prise de « risque » d’une promotion, d’une prise de parole en public, … .

Les croyances jouent un rôle important à entretenir le syndrome. En effet les croyances (limitantes dans ce cas) entretiennent notre scénario, elles vont orienter comportement et propos, et permettre à « l’imposteur » de filtrer et déformer ce qu’il perçoit dans son environnement afin que cela colle en tout point à sa vision du monde et, dans le cas présent, entretenir son sentiment de ne pas mériter.

Pour illustrer cela, « l’imposteur » qui se croit en incapacité de réussir dans une promotion qui lui serait proposée, va, pour prendre sa décision, rechercher tout ce qui explique sa prétendue incapacité : « le produit que je vends est tellement abouti que je n’ai aucun mérite dans mes résultats commerciaux », « l’équipe était très autonome, je ne lui ai rien apporté en tant que manager », « je dispose d’un excellent matériel, je n’ai aucun mérite »

D’où vient ce syndrome ?

Il peut traduire une peur profonde de ne pas être accepté et d’être rejeté. Il s’exprime aussi lorsque le besoin d’appartenance est extrême (la survie).

Dans l’enfance 4 types d’environnement peuvent favoriser l’émergence du syndrome :

  1. Enfant survalorisé et idéalisé
  2. Absence totale de valorisation : ce qui ne le rend pas conscient de son intelligence ou de sa valeur
  3. La comparaison dans la fratrie, ou le décalage entre la reconnaissance de l’école et de la famille
  4. Profils atypiques avec des compétences différentes et non reconnues.

Comment sortir du syndrome de l’imposteur ?

Il est important de rappeler que le syndrome de l’imposteur est un RESSENTI, il est donc rare que la victime de ce syndrome puisse donner des éléments tangibles.

La première étape consiste à se mettre en pause pour pouvoir prendre le recul nécessaire et ainsi prendre conscience de ses réalisations. Faire cela seul n’est pas toujours aisé, il est alors possible de solliciter une personne de confiance dans son entourage pour en parler ou de faire appel à un professionnel de l’accompagnement comme un coach professionnel. Quand ce ressenti est partagé, alors on s’autorise à lever le masque.

Ensuite il est important de faire des choses qui nous aident à ne pas se sentir comme un imposteur. Par exemple : se recentrer sur son expertise, ce dans quoi on se sent dans la zone de confort, où l’on sait que l’on réussit bien.

Enfin il est important de (re)connaitre le syndrome, pour pouvoir l’identifier et le prévenir, en mettant en place un système de rappel des réussites passées et de sa responsabilité dans ces réussites (dans mon exemple de départ : regarder le palmarés global du joueur, et objectiver tout le travail préparatoire avant la grande échéance comme les jeux Olympiques).

Le syndrome n’est pas figé, il passe, il revient : il est mouvant. Par contre quand il s’installe il est une barrière à l’expression de son potentiel.

Les doutes et les questions sont régulièrement présents dans les étapes de vie professionnelle, ces moments d’incertitude sont plus facilement surmontables quand on se sait faillible et imparfait (comme tous les êtres humains, d’ailleurs !) et que l’on s’autorise à ne pas tout réussir, et à réussir imparfaitement ! Dans les erreurs et les imperfections on apprend.

Alors faites-vous parti des 60% de la population mondiale qui peut avoir ressenti ce syndrome au moins une fois ?